lundi 23 mars 2009

Vivez des émotions cinéma intense, avec Carte Noire...

C’était l’automne. Nous allions voir « Gladiator » qu’un vieux cinéma de banlieue repassait ; un de ces cinémas où la machine à Pop corn fait penser aux films des années 50, où la caissière est une rêveuse qui aurait voulu être star d’Hollywood, qui connaît la vie de chaque acteur un minimum célèbre sur le bout des doigts, et où le nombre de personne dans la salle ne dépasse jamais les dix. Après quelques dizaines de minutes de marche, nous sommes arrivés devant les grandes portes boisées de la cinémathèque. Nous avons tous les cinq mis à exécution notre plan habituel : trois d'entre nous devaient payer des tickets, monter dans la salle, et ouvrir chacun une des portes de sortie de secours pour que les deux autres puissent rentrer… sans payer six euros un film qui était sortit plus de dix ans auparavant. Cette technique avait toujours marché, et ce jour là et pour la première fois, c’était à moi d’attendre l’appelle qui me préviendrait que toutes les portes étaient ouvertes. Dehors, il pleuvait. J’avais jeté mon parapluie tellement j’étais lassé qu’il se retourne sans cesse, et des gouttes tombaient de mes cheveux sur mes épaules en faisant de minuscules éclaboussures. Justin attendait avec moi :
- T’imagines, il y a plus de trois portes à ouvrir ?
- Ce serait con ! Et bah c’est toi qui irai payer, moi je reste là !
- Mais non tu ne devrais pas, la pluie va défaire tout ton brushing…
- Moui ce n’est pas faux, tandis que toi il n’y a rien du tout à défaire ! répliquais-je.
Ce garçon était un des Squatteurs présents à chaque sortie, qui se démenaient pour pouvoir être avec ses amis dés qu’une sortie était prévue, mais qu’une fois avec eux, prenait un malin plaisir à les charrier gentiment, tout particulièrement moi. Cependant, je possédais moi aussi cet amour là, et nous en avions donc crée un jeu de séduction… qui n’avais toujours pas aboutit.
Nous fîmes le tour du bâtiment et, une fois derrière, attendîmes au bas des escaliers : jamais il ne fallait monter, n’importe quel vigil aurait pu passer et comprendre en un rien de temps.
- Au même moment, si on était resté dans notre campagne, on aurait pu se croire dans "Match Point"… Quoique, la ressemblance entre le sex-appeal de Jonathan Rhys-Meyers et le mien est flagrante, mais il est vrai qu’entre Scarlett Johansson et toi… je ne vois pas… sauf peut-être la couleur de cheveux !
- Et puis tu as oublié que Jonathan Rhys-Meyers est une star, ce qu’il ne pourra jamais t’arriver.
Au même moment, la porte en haut de l’escalier en colimaçon s’ouvrit, et Ingrid apparu. Nous montâmes les escaliers quatre à quatre, et traversâmes les couloirs, les portes se fermant les unes après les autres et nous arrivâmes dans la salle tous les cinq. Une fois de plus, nous avions réussi…
Nous nous mîmes tout au fond, comme toujours, et Justin se plaça à côté de moi. Ingrid le surprit :
- Dis donc Justin Bridoux, tu as beau passer ton temps à casser Chayle, à la moindre occasion tu t’assois à côté d’elle. Je vous avais bien dit de ne pas les laisser tous les deux en bas, elle aurait pu se faire violer.
- Mais non voyons, tu ne réalises pas à quel point « Gladiator » est un film d’horreur épouvantable : il va avoir peur, il faut bien que quelqu’un le rassure.
Un spectateur s’essaya devant au moment où le rideau découvrit un immense écran immaculé. Nous étions donc six en tout… Le film commençait... Mon film commençait ! Une main d’homme caressant le blé apparue, un visage triste, un oiseau qui s’envole. La musique qui se fait de plus en plus forte, expectorée par des enceintes puissantes. Je me calai au fond de mon siège et piochai quelques Pop corn dans le cornet d’Ingrid.
- Ca va, tu es allaise ?
- Voilà que tu t’inquiètes de ma santé maintenant, répondis-je à mon voisin.
« Je me suis sentie seule toute ma vie, sauf avec toi. »
- Toi aussi, Chayle, tu t’es sentie seule toute ta vie, sauf avec moi, n’ai-je pas raison.
- Si, tout à fait, ton intelligence me surprend !
- Je te surprends tous les jours de toute façon.
- N’exagères pas quand même !
- Tu peux l’avouer, cela fait du bien parfois, de ne plus cacher ses sentiments ?
- Quels sentiments ? demandai-je à Justin.
- Bah tu m’aimes !
- Hey ! vous ne voulez pas vous taire un peu, y en a qui essaient de se concentrer sur le film ! rétorqua un de nos amis.
Je me tournai alors vers l’écran. Maximus achevait un mot, s’approcha de son amante, et l’embrassa, d’abord du bout des lèvres, puis avec passion. Je tournai un tout petit peu la tête vers mon voisin. Lui aussi me regardait, et me confia :
- Si ce n’est pas mignon !
Je m’approchai de lui et chuchotai :
- Parfois, tu parles trop !
Il approcha lentement son visage du mien, comme pour parer à ce que je n’accepte pas le baiser qu’il allait me donner et, au dernier moment, quand des bruits d’épée sortirent des enceintes, je me replongeai dans mon fauteuil, et empoignai quelques Pop corns, que je lui lançai dessus.

samedi 21 mars 2009

Bourgeoisie campagnarde

J’étais au lycée. C’était un petit lycée de campagne, que la région avait essayé d’édifier le plus près possible du centre ville, qui restait néanmoins bourré de tracteurs et d’hommes aux chapeaux de pailles, emportant avec eux les odeurs plus ou moins nauséabondes du milieu fermier. C’était une école plutôt plate et longue, mais qui donnait l’impression, lors d’une vue d’ensemble, d’être respectée par les autres bâtiments, qui se faisaient petits et rabougris par rapport à elle. Je n’en voulais à personne, ni de m’avoir fait emménagé à la campagne, ni d’avoir fait de ma ville ce qu’elle était : un village bourré de jeunes pseudo délinquant de quatorze ans qui fumaient des joints en jogging Adidas à minuit en taguant des « blazs » différents chaque jour sur des murs que personne ne prenait le temps de regarder (sauf peut-être les jours de marché) ; ou bien des quinquagénaires restant dans leur maison qu’il pleuve ou qu’il vente ou que le soleil brille, caressant leur chat sur leur genoux et appréciant la sensation de douceur qui les envahissait dés lors en regardant « Question pour un champion » ; ou bien des familles qui se promenaient tous les dimanches à quinze heure pour digérer des repas typiques, économiques et équilibrés, ces familles dont l’homme monologuait sur les bienfaits de la nature, la femme l’écoutait d’une oreille qui se faisait distraite, un enfant écoutait de la techno, casque sur les oreilles et mains au fond des poches… Et puis il y avait ceux que je préférais, ceux que j’aimais appeler la Petite Bourgeoisie. Dans un coin du village, là où la campagne se faisait moins abondante, la Petite Bourgeoisie régnait, aimant à se dorer la pilule sous un soleil pale de printemps ou tapant d’été, et rythmant leur vie de soirées réputées.
Je ne savais même pas vraiment pourquoi j’étais là bas. J’avais suivi une bande d’amis qui m’avait prié de les suivre. Je crois qu’on devait fêter les vingt ans de je ne sais quelle futur starlette dénigrant la campagne. Inutile de préciser que je venais les mains vides… vides de cadeaux en tous cas, parce que mon sac que je portais à bout de bras contenant une quantité de préservatifs et de cigarettes que je n’ai pas envie de définir. Si les gens étaient encore habillés autour de la piscine, ils l’étaient avec classe. Les filles portaient des robes parfaites, assorties de bracelets clinquants ou de diamants, et les hommes s’étaient vêtus de chemisettes et de pantalon à pinces des plus ravissants. Les autres possédaient un bronzage parfait, et je suis sûre que même l’intérieur des doigts de pieds avait cette magnifique teinte brunâtre d’été.
Je savais chez qui je me rendais et j’avais prévu le coup. Je me suis tout de suite mise dans l’ambiance en commandant, à un bar peuplé de beau gosses richissimes, un Mojito que j’avala très vite. Je me suis très vite sentie seule, et j’engagea alors la conversation avec un groupe de jeunes qui me paraissaient un peu décalés par rapport au reste de la populace. Nous étions assis en cercle dans des canapés doux et confortables sur lesquels on avait envie de rester toute notre vie, et nous bavardions. Ils étaient une dizaine à s’appeler les Squatteurs. Ils apprenaient par n’importe quelle connaissance l’existence d’une fête, d’un anniversaire, d’un buffet ou d’un concert, et ils faisaient des ces évènements leur principale source de distraction. Ainsi, ils faisaient un nombre de rencontre inimaginable, se trouvaient parfois dans des situations délirantes, et avaient toujours un bon nombre d’anecdotes à raconter.
Il se trouva que ces personnes ne passaient pas leur temps à papoter. Je les vis ce servir au bar, au buffet, et faire des plongeons époustouflant dans une piscine peuplée de couple s’embrassant, d'amis papotant une coupe à la main, de parasites éclaboussant par ci par là, et de groupe ayant passés trop de temps au bar avant de venir faire des sauts dans l'eau claire et chlorée de la piscine … Je restais assise à fumer tranquillement sur un des canapés à côté d’une des Squatteuses.
- Toi aussi tu fais un peu tache sur le tableau ! me dit-elle.
- C'est-à-dire ?
- Tu ne viens pas de ce monde.
- Non ! Je viens du plus profond de la campagne, mais j’ai une vie sociale qui m’emmène dans des endroits où je fais tache !
Elle sourit, me tendit sa main et se présenta :
- Ingrid !
- Michelle. Mais on m’appelle Chayle !
- Chayle, je vais t’apprendre à profiter.
Elle m’invita à me mettre en maillot de bain, et elle fit de même. Malgré le fait qu’elle n’était qu’une Squatteuse, Ingrid avait le même physique prometteur que cette Bourgeoisie et portait un maillot blanc immaculé, sur une peau brunit. Elle sauta dans la piscine gracieusement, sans porter aucune attention à sa couche de cheveux superficielle, alors que toutes les autres baigneuses étaient coiffées d’un brushing qu’elles n’auraient mouillés pour rien au monde.
Je fis une bombe explosive au beau milieu de la piscine, provoquant quelques plaintes et jurons. Vivre du bonheur et de la richesse des autres me convenait, et le côté excentrique, que certains gens repoussaient mais que j’avais en moi, prenait le dessus sur mon instinct calme et respectueux : je voulais vivre de soirée, rencontrer des gens avec qui pouvoir faire des expériences inimaginables. Je sautai, et je commençai une aire d’oisiveté…